Un grain de folie et une imagination sans limite m'invitent à plonger dans le temps et l'espace à la rencontre de personnages historiques, mythiques ou légendaires afin de partager un moment de leur vie... Une histoire revisitée sans prétention dans un décor dressé sur une table pour deux. Invitation au rêve et à l'évasion. Ne craignez rien et suivez votre conteuse de tables!
Par Catherine Gerard
J'avais à peine neuf ans quand ma famille, pauvre, décida, contre quelques yens, de me mettre au service d'une okâsan ( mère) tenancière d'une Okiya, maison de Geisha.
Je me retrouvais ainsi loin de ma famille dans un Hanamachi de la ville de Kyoto à faire le ménage et laver le linge de mes " grandes soeurs" geisha et jeunes apprenties.
Combien de fois suis-je allée me cacher pour laisser couler mes larmes et s'exprimer douleur et chagrin.
Il me fallait me lever à l'aube et me coucher sur une simple natte bien après le coucher du soleil. Toujours à saluer, remercier, courber le dos les yeux baissés.
taJe ne sais pas si ce fut une chance pour moi mais Okâsan pensait que j'étais assez jolie pour devenir maiko,
apprentie geisha.
A douze ans
Je reçus alors une éducation stricte, il me fallait apprendre les arts séculaires nippons
La musique, la cérémonie du thé, la danse, l' Ikebana, la Poésie et la littérature et surtout la culture générale car une geisha doit pouvoir prendre part à toute forme de conversation.
La Geisha est une artiste qui se doit d'être en tout point aimable et raffinée.
A cette époque j'eu enfin droit de porter mon oebe, premier kimono de soie vive, au col rouge, ceint d'un obi noué au dos en traîne...
J'appris aussi à me peindre le visage et la nuque en blanc,
à dessiner ma bouche en rouge et mes sourcils au charbon.
Chaque semaine , mes cheveux étaient coiffés durant des heures et je devais dormir sur le côté, la nuque posée sur un oreiller de bois afin de ne pas me décoiffer
Je devais apprendre , répéter, travailler mon maintien, mes expressions et reproduire avec précision chaque geste codifié.
pour jusque tard dans la nuit rejoindre des hommes d'affaires
pour lesquels je devais danser, chanter
être délicate comme la fleur, aussi forte et souple que le saule
Mon rôle était de distraire leur esprit ,de leur proposer des jeux, de participer à leur conversation , de leur servir le thé ou le saké, de rire la main devant la bouche à leurs plaisanteries.
Mon rôle n'a jamais été celle d'une prostitué, le sexe n'était pas inclu dans notre prestation... cela était réservé aux courtisanes.
Cependant l'acte sexuel n'était pas interdit mais laissé à notre bon vouloir, seul le droit d'aimer était prohibé.
Avec les années, je devins Geiko ou Geisha
Je n'étais plus obligée de porter ce masque où ces coiffures extravagantes dites de pêche fendue.
Je pu être moi, mon visage libre de ses expressions, mon obi noué plus court, mon kimono plus sobre s'ourlait désormais d'un col blanc était toujours décolleté au dos car la nuque est pour le japonais l'endroit le plus érotique et sensuel.
Il me fallait travailler dur et enchaîner plusieurs prestations par soirée pour rembourser les frais occasionnés à Okâsan pour mon instruction.
Avec le temps et l'expérience,
Je fus reconnue, réclamée
et ma notoriété enrichit la maison dont je faisais partie. On aimait ma conversation, ma beauté, ma façon de danser.
Je représentais tout le raffinement du pays du soleil levant.
Je pouvais arrêter un homme d'un seul regard...
et le son de ma voix suffisait à retenir son attention.
Mais je me devais pour ne pas me perdre de rester un fantasme innaccessible...
Lui,
demanda ma présence,
me réclama de plus en plus souvent
encore, encore , encore
L'attirance fut telle que je devins son amante
et lui mon protecteur.
Il m'aida à payer ma dette et à répondre à mon
choix de quitter le métier de Geisha
pour devenir son épouse.
Aujourd'hui mon visage à peine maquillé porte les traces de mes joies, de mes peines
chaque ride reflète un instant de ma vie
Je ne regrette rien de mes années dans la maison des femmes, elles ont fait de moi la femme que je suis, instruite, éduquée qui a gagné par son travail et son renoncement sa liberté.
Aujourd'hui dans mon regard, on peut toujours lire tout l'amour que j'ai pour lui
et c'est pour notre plaisir que j'aime et m'applique à être , lorsque le nuit tombe,
sa geisha aimante et dévouée.
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